Alpinisme hivernal en Roumanie

Destination exotique s’il en est, les Carpates ont de quoi ravir les alpinistes amateurs.

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Les Carpates, une chaîne montagneuse qui a conservé un aspect sauvage unique en Europe, sont le terrain idéal pour ceux qui souhaitent se livrer à des activités outdoor « comme au bon vieux temps ».

Le climat continental et une altitude respectable garantissent des conditions de neige et de glace excellentes chaque hiver : la recette parfaite pour des courses d’alpinisme hivernal de toute beauté.

Vous avez envie de grimper dans des régions méconnues ? On vous dit tout

Quelques informations importantes avant de partir

Avant toute chose, il est bon de faire quelques précisions sur les Carpates, et les activités de montagne en Roumanie. Gardez bien en tête, que les Carpates ne sont pas les Alpes, et que la Roumanie, ce n’est pas la France, l’Italie ou la Suisse.

Topo, marquage et information

Le seul véritable topo d’alpinisme valant quelque chose date des années 70, et n’a pas été réédité. C’est aujourd’hui un livre rare et recherché.

Les marquages peuvent être excellents s’ils ont été refaits récemment par les organismes officiels, déroutants s’ils ont été faits par une association pleine de bonne volonté, mais qui n’a aucune idée des pratiques standardisées, ou inexistants sur les tracés moins populaires.

Les informations que l’ont peut trouver en ligne sont variables et aléatoires, notamment sur les réseaux sociaux où nombre d’alpinistes n’hésitent pas à donner leur avis sans avoir aucune idée sur la question.

Les cartes sont d’assez bonne qualité aujourd’hui (notamment celles de muntii nostrii), mais n’ont rien à voir avec la qualité des cartes IGN auxquelles nous sommes habitués.

  • Vous l’aurez compris : avant de vous lancer dans les Carpates, prenez bien soin de vérifier toutes vos sources d’information.

Les secours en montagne

En Roumanie, les secours en montagne sont l’apanage de Salvamont. Ils sont compétents, motivés, et depuis quelques années procèdent à des échanges avec les secouristes français afin de continuer à s’améliorer.

MAIS, ils ne disposent pas des mêmes moyens qu’en Europe de l’Ouest. Si l’hélicoptère n’est pas disponible, ils iront chercher le randonneur blessé en ski de rando ou en raquettes, ce qui peut prendre des heures. Vous êtes prévenus.

  • En Roumanie plus qu’ailleurs, respectez ces hommes qui risquent leur vie pour sauver la vôtre en ne vous mettant pas en danger inutilement par un comportement irresponsable.
alpinisme hivernal dans les carpates
Les crêtes enneigées de Piatra Craiului

Les guides de montagne

Une information : jusqu’à récemment, il était possible de devenir « guide de montagne en Roumanie » par correspondance (oui, je sais, c’est difficile à croire…). En 2020, il était encore possible d’obtenir ce titre de guide de montagne en suivant un simple cours théorique et quelques exercices pratique.

Tout ceci est en train de changer, et de nombreux guides roumains sont excellents. Mais vous devez savoir qu’il en existe aussi pas mal qui n’ont rien à faire des règles de sécurité de base et dont les connaissances de la montagne ont été acquises en regardant des vidéos YouTube…

  • Choisissez un accompagnateur auquel vous faites confiance ou qui vous a été recommandé.

Le climat

Les altitudes relativement basses peuvent faire penser qu’il y fait moins froid que dans les Alpes. FAUX !

Le climat continental montagnard ne pardonne pas, et des températures de -15° ou -20° sont fréquentes dans les Carpates, même bien en dessous des 2000m.

  • Prévoyez des vêtemens chauds et imperméables comme pour la haute montagne.

Toutes ces précisions faites, il est maintenant temps de s’intéresser à deux tracés d’alpinisme hivernal de toute beauté.

Les crêtes de Piatra Craiului

  • Difficulté : PD+ / AD-
  • Durée : 3 jours
  • Altitude max. : 2238m (Sommet la Om)
  • Accès : Zarnesti

Il s’agit probablement de la course d’alpinisme hivernal la plus connue : impressionnante mais peu difficile techniquement, facile d’accès et surtout absolument superbe.

La contrepartie : vous risquez d’y croiser du monde pendant les vacances ou les week ends, et il est arrivé plus d’une fois que le refuge Grind II (attention : en Roumanie, un « refuge » c’est une petite cabane non gardée, l’équivalent du refuge alpin est appelé « cabane ») soit plein, obligeant à un bivouac dans la neige.

Jour 1 : Zarnesti – Cabana Curmatura (1470m)

Depuis la ville de Zarnesti, continuer la route en direction du Parc National Piatra Craiului jusqu’au lieu-dit « Fantana lui Botorog ». Cette partie peut être faite en voiture.

Vous devrez ensuite grimper en forêt par un sentier bien marqué (bandes verticales jaunes) jusqu’à une grande prairie alpine d’où vous pourrez admirer les sommets impressionnants que vous allez parcourir dès le lendemain.

Le chemin continue de manière beaucoup plus douce, jusqu’à la cabane Curmatura, où vous pourrez passer la nuit en tout confort.

Comptez environ 3 heures depuis « Fantana lui Botorog », une grosse heure de plus depuis Zarnesti.

piatra craiului en hiver
Voici la crête dans son intégralité, à parcourir de droite à gauche

Jour 2 : la crête Nord

Depuis la cabane Curmatura suivez le marquage à point rouge jusqu’au col Curmatura, à 1600m environ. De là, vous prenez vers la gauche et commencez l’ascension technique de Varful Turnu, qui vous obligera à utiliser piolets, crampons et techniques alpines malgré une altitude sous les 2000m.

Depuis ce sommet, vous prenez pied sur la crête nordique, que vous suivez par un chemin évident. Elle ne présente aucune difficulté jusqu’au refuge Ascutit, situé près du sommet du même nom, à 2150m.

Commence ensuite ce qui est sans aucun doute la partie la plus technique et exposée de ce tracé, entre rochers et pentes enneigées, au bord de précipices de plusieurs centaines de mètres. C’est absolument superbe.

Le point culminant de votre sortie (et du massif), est Varful la Om (2238m), que vous atteignez un peu après avoir franchi une dernière difficulté. Un peu plus loin sur la crête, vous trouverez le refuge Grind II, qui n’est rien d’autre qu’un demi-ballon en plastique  avec deux banquettes en bois, où vous pourrez passer la nuit.

ours sur les cretes des carpates en hiver
Même en plein hiver, les ours aiment bien venir admirer le paysage sur la crête, comme en témoignent ces empreintes 🙂

Jour 3 : la crête sud

Ce troisième et dernier jour commence par une partie assez technique, bien que plus facile que la veille, qui demande de bien faire attention selon les conditions de neige.

Ensuite, la crête sud devient bien plus facile, comme dans la première partie, et on redescend tranquillement vers le col Funduri, qui marque la fin de la célèbre crête de Piatra Craiului. Il y a ici un refuge où il est possible de passer la nuit et reprendre des forces.

Cela peut être utile, car le retour à Zarnesti est long, très long ! Il faut redescendre (sentier marqué par des points rouges puis un triangle bleu, puis une bande bleue) jusqu’au lieu-dit La Table, d’où plusieurs options s’offrent à vous pour revenir à votre point de départ.

La plus belle est probablement le chemin marqué par une croix rouge qui vous emmène à travers les gorges de Zarnesti (haut lieu de l’escalade en Roumanie) jusqu’à Fantana lui Botorog, d’où vous pouvez rejoindre la ville de Zarnesti.

Padina Crucii

  • Difficulté : AD+ / D-
  • Durée : 2 jours
  • Altitude max. : 2300m environ
  • Accès : Rasnov

Le massif de Bucegi, à proximité de la capitale Bucarest, est probablement le plus parcouru de Roumanie. Des falaises impressionnantes, un plateau superbe, des vues à couper le souffle : sans surprises, il attire les touristes locaux et étrangers.

La cabane Malaiesti est une destination de choix pour ceux qui aiment la nature, aussi bien en été qu’en hiver, et celle-ci est souvent animée jusque tard dans la nuit. Pourtant, elle donne aussi accès à un tracé méconnu et très peu parcouru, où l’on a vite l’impression d’être seul au monde.

À ne parcourir que lorsque les conditions (météo ET neige) sont bonnes !

Jour 1 : Rasnov – cabana Malaiesti

Mieux vaut avoir une voiture, ou prendre un taxi qui vous dépose, car le chemin à pied depuis la ville de Rasnov est long, et pas forcément agréable !

On suit la route le long de la vallée Glajeriei, et l’on poursuit sur un chemin de terre jusqu’à une usine électrique. On continue encore un peu, jusqu’à une intersection où il est conseillé de laisser la voiture.

Le sentier, marqué par une bande bleue et très emprunté, monte à travers la forêt, en offrant quelques points de vue superbes sur les sommets environnants et les profondes vallées. Après deux heures de marche environ, on arrive au cirque de Malaiesti, pour découvrir un paysage absolument féérique, qui démontre que les Carpates n’ont rien à envier aux Alpes ou aux Pyrénées.

Il est possible que les choses aient changé, mais la cabane en elle-même ne constituera pas le point d’orgue de votre aventure. Bondée et mal entretenue, elle profite clairement de sa situation et de son succès actuel pour offrir le minimum en demandant le maximum.

Si vous y êtes le week-end, pensez à prendre des bouchons d’oreilles : la « discothèque » peut durer jusqu’à tard dans la nuit…

cirque de malaiesti et cabane
A gauche, le Bucsoiu, à droite Padina Crucii, en arrière plan le couloir « Hornul Mare »

Jour 2 : Padina Crucii

Derrière la cabane, un sentier marqué par une bande jaune monte à peu près en ligne droite vers la crête, où l’on distingue une gigantesque croix en métal. S’il y a beaucoup de neige (ce qui est à peu près toujours le cas) et que personne n’est passé avant (ce qui arrive souvent), ouvrir la trace dans cette montée raide est un véritable défi physique !

Une fois sur la crête, on peut faire un petit détour à droite pour aller voir la croix, mais notre itinéraire continue sur la gauche, le long du marquage à bande jaune, pendant quelques centaines de mètres.

Avant que celui-ci ne descende dans la vallée suivante, on oblique sur la gauche pour atteindre la ligne de crête que l’on tiendra ensuite jusqu’au sommet.

La crête en elle-même est globalement facile, avec quelques ressauts rocheux intéressants et des passages vertigineux, mais aussi quelques endroits particulièrement exposés et dangereux en cas de mauvaise neige. Dans un tel cas, mieux vaut rebrousser chemin et revenir plus tard plutôt que de venir allonger la liste des disparus en montagne.

Le passage le plus difficile se situe près de la sortie, lorsqu’il est nécessaire de traverser un couloir abrupt avant de se lancer dans une ascension raide et exposée. Si la neige n’est pas stable, ou si vous ne pouvez pas poser de point d’assurage, ne vous y engagez pas !

Ceci dit, lorsque les conditions sont bonnes il n’y a pas lieu de s’inquiéter.

Une fois ce ressaut franchi, vous atteignez le plateau, un peu au-dessus de « hornul mare », la route d’accès habituelle en hiver. Si vous êtes en forme, vous pouvez pousser jusqu’au sommet de Varful Scara (2420m) (comptez une heure aller-retour, pas de difficulté), à votre droite en suivant le marquage à bande rouge.

Le retour s’effectue par ce même sentier à bande rouge, mais sur votre gauche, jusqu’à cet « hornul mare », indiqué par des bandes bleues et bien visible.

Attention, il est assez raide, et surtout vous pouvez y rencontrer des « touristes » en basket qui ont décidé de faire « eux aussi de l’alpinisme parce que ça a l’air facile sur Facebook ». À peu près chaque week-end il y a un accident, plus ou moins grave, à cet endroit… Prudence, donc.

Ensuite, on est de retour dans le cirque, et on descend tranquillement en direction de la cabane Malaiesti, en admirant à droite le Bucsoiu (superbe à parcourir en été) et à gauche la Padina Crucii que vous venez de parcourir.

Depuis la cabane, le retour à la voiture se fait par le même itinéraire de montée.

alpiniste en hiver dans les Carpates en Roumanie
Toujours progresser encordé pour éviter les drames !

C’est à vous

J’ai parcouru ces deux itinéraires, en compagnie d’un guide pour des raisons évidentes de sécurité. Comme dit dans l’introduction, ne sous-estimez pas les Carpates, et méfiez-vous des informations disponibles sur le net, en particulier sur les réseaux sociaux.

En faisant preuve d’un minimum d’humilité et de respect pour la montagne, et en cherchant avant tout à vous faire plaisir plutôt qu’à épater les copains, vous pourrez découvrir un terrain de jeu absolument incroyable, dans un cadre naturel que l’on ne trouve plus que difficilement dans les Alpes.

N’hésitez surtout pas à utiliser la rubrique commentaires !

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Luis Mage

Originaire des Hautes-Alpes, Luis a déjà vécu dans une dizaine de pays. C’est un amoureux de la petite reine, qu’il a pratiqué en compétition pendant son adolescence. Il est aussi passionné par la montagne et compte de nombreuses ascensions sur les sommets du monde entier. Lorsqu’il n’est pas en vadrouille, il partage son temps entre ses chats, ses chiens, et son travail de rédacteur.

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